lundi 25 mai 2009

Les petites chaussures noires


J’avais achetée une paire de chaussures. Une jolie paire noire, passe-partout et élégante. Des talons pas trop hauts, confortables. Un petit nœud vernis dessus. Un achat mûrement réfléchi.

J’avais longuement hésité. Après tout, j’ai déjà le même modèle en violet. Et puis 15€, ça ne parait pas cher aujourd’hui mais si on parvient à se souvenir que ça fait 100 francs et qu’on ne les aurait jamais mis dans cette paire de chaussures avant que l’euro n’apparaisse, on se dit que finalement on n’en a pas si besoin de ça de cette paire de chaussures. Mais bon, je n’en ai pas des chaussures comme ca. Des passe-partout qui font ni trop habillées, ni trop négligées. Alors j’ai craqué.

J’avais imaginé pleins d’occasions où je pourrais les porter. Mais pas celle-là. Si j’avais su que j’inaugurerai cette paire de chaussures pour une occasion pareille, je m’en serai bien passée.

Hier soir, je suis rentrée chez moi. Furieuse contre la connasse qui a refusé de reculer pour me laisser rentrer ma voiture dans la cour et m’a obligé à me taper un nouveau tour de pâté de maison. Tout ça pour se garer en warning devant le portail de mon voisin pour aller chercher sa baguette de pain. Une pouf quoi.

Bref. Maman a attendu deux secondes que je me calme avant de m’annoncer la nouvelle. Isabelle est partie. Elle ne reviendra jamais. Elle a rejoint les anges. Isabelle, c’est la plus jeune des cousines de mon père. Elle avait 39 ans et un crabe sournoisement ancré en elle. Ca fait chier. C’est pas juste.

Je pense à sa fille qui entre dans l’adolescence et va devoir l’affronter sans une mère à ses côtés. Je pense à son mari, cousin de mon père lui aussi, qui doit être fort pour deux. Je pense à ma grand-mère qui était aussi sa marraine. Je pense à ma tante qui a fini son traitement contre un autre crabe féminin et qui, je le sais, va être minée encore plus dans son chemin vers la sérénité à retrouver. Je pense à mon autre tante, autrement plus proche de cette cousine. Généreuse, elle est partie le matin de l’annonce de la tragique nouvelle pour la Corse, histoire de remonter le moral à une amie, malade elle aussi. Je pense à mon cousin, à Béziers, bientôt papa. Lui, il a vécu chez ces cousins pendant un bon moment. Je ressens le dilemme qui doit le ronger : venir lui dire au revoir ou rester près de sa compagne, enceinte de huit mois trois quarts.

Je savais que cette semaine serait dure à supporter. Les résultats d’admissibilité tomberont jeudi et vendredi. Mais je ne pensais pas qu’elle serait dure à ce point-là. Pas dure dans ce sens-là. J’avais achetée une paire de chaussures. Une jolie paire noire. J’avais imaginé pleins d’occasions où je pourrais les porter. Mais pas celle-là.

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